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LE MIROIR DES JOURS


Ah ! s’évader enfin des ombres de la terre,
Libre comme un oiseau dans l’azur enchanté !
Pour l’âme, quelle ivresse exquise et salutaire
De sentir le frisson sacré de la Beauté !

Si Dieu n’avait pas mis en nous l’élan suprême,
L’initial essor du cœur tendant au ciel ;
Si nous devions croupir, peuple morne au front blême,
Dans la matière épaisse et le hideux réel,

Ô désolation de vivre, nuit affreuse !
Fauves rugissements des brutaux appétits !
Et, dans le sang versé dont la mare se creuse,
Râles, sous les talons vainqueurs, des tout petits !…

Précieuse croyance en la bonne justice,
Bel hymne intérieur d’espérance et d’amour,
Relève mon courage au bord du précipice
Et ne me quitte pas jusqu’à mon dernier jour !