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LUCAIN.

dans le lointain la ville, Rome qu’il n’a pas vue depuis qu’il est allé combattre dans le Nord ; et contemplant les murs de la patrie : « Quoi ! dit-il, sanctuaire des dieux, les braves t’ont délaissé sans livrer bataille ! pour quelle cité prendra-t-on les armes ? Les dieux soient loués, si le Latium n’a pas vu descendre sur ses bords le barbare furieux de l’Orient et le Pannonien joint au rapide Sarmate, et le Dace et le Gète ! Rome, défendue par un chef si lâche, la Fortune t’a prise en pitié ! tu n’as qu’une guerre civile. » Il dit, et s’élance dans les murs qu’il remplit d’épouvante : car on croit qu’il va traiter Rome comme une ville conquise, et la livrer aux flammes dévorantes avec les débris de ses dieux mutilés. Telle est la mesure de la terreur publique : tout ce que peut César, personne ne doute qu’il ne veuille le faire. On ne sait feindre ni les heureux présages, ni les cris de fête d’une joie tumultueuse ; à peine sait-on maudire ! La foule des sénateurs, que César n’a pas le droit de convoquer, est sortie de ses retraites et remplit le temple d’Apollon. Les faisceaux du consul ne brillent pas dans le sanctuaire ; on n’y voit point le préteur que la loi place après le consul : plus de magistrats, plus de chaises curules. César seul est tout. Le sénat vient prendre les ordres d’un citoyen, et les Pères, sur leurs siéges, sont prêts à décréter, pour lui, s’il le veut le trône ou des autels ; pour eux-mêmes, le supplice ou l’exil. Grâces aux dieux, César a honte de commander ce que Rome n’aurait pas honte de souffrir !

Cependant la liberté s’indigne, et par la voix d’un citoyen, tente d’opposer le droit à la force. Le hardi Métellus a vu des leviers énormes soulever les portes du temple de Saturne ; il accourt, repousse les cohortes, et s’arrête sur le seuil qu’elles n’ont pas encore franchi. L’amour des richesses est donc le seul qui ne craigne ni le fer ni la mort ! Les lois périssent anéanties sans que personne s’arme pour elles, et le plus vil de nos biens, l’or, engage la querelle. Le tribun défend le pillage, et d’une voix ferme, interpelle ainsi le vainqueur : « Vous n’ouvrirez qu’en me perçant le flanc ces portes ébranlées ! brigand, tes mains sacriléges ne ravirent ces richesses qu’arrosées du sang d’un tribun ! Notre puissance outragée trouve des dieux qui la vengent ; les anathèmes d’un tribun accompagnèrent les drapeaux de Crassus et le dévouèrent à de funestes combats. Tire donc le glaive. Tu ne peux craindre cette foule qui se plaît au spectacle de tes crimes : nous sommes seuls ; Rome est déserte. Non, tu ne paieras pas ta milice avec nos trésors ; tu as d’autres peuples à écraser, d’autres villes à donner ; car tu n’es pas réduit à cela, qu’il te faille ravir les dépouilles de la paix ; César, il te reste la guerre ! »

Le vainqueur l’entend, et son courroux éclate. — « Tu te flattes en vain d’une mort glorieuse.

Excelsa de rupe procul jam conspicit Urbem,
Areloi toto non visam tempore belli ;
Miratusque suæ, sic fatur, mœnra Romæ :
« Tene, Deum sedes, non ullo marte coacti
Deserucre viri ! pro qua pugnabitur urbe ?
Di melius, quod non Latias Eous in oras
Nunc furor ineubuit, nec juucto Sarimata velox
Pannonio, Dacisque Getes admislus, habenti
Tam pavidum tibi Roma ducem Fortuna pepereit,
Quod bellum civile fuit. » Sic fatur, et Urbem
Attonitam terrore subit : namque ignibus atris
Creditur, ut capte, rapturus mornia Romæ,
Sparsurusque Dcos. Fuit hæe mensura timoris ;
Velle putsnt, quodeumque patest. Non omnia festa,
Nou fictas lxto voces simulare {umultu :
Vix odisse vacat. Phoœbea palatia complet
Turba Patrum, nulle cogendi jure senatus
E latebris educta suis ; nen Consule sacræ
Fulserunt sedes ; non provima lege putestas
Prætor, adest ; vaouæque loco cesscre curules.
Omnua Cisar erat. Privatæ Curia vous
Testis adest. Sedere Patres censere parati,
Siregnum, st temola sibi, jugulumque senatus,
Exiliumque petat. Melius, quod plura jubere
Erubuit, quam Roma pati. Tamen exit in iram,
Viribus an possint obsistere jura, per unum
Libertas experta virum : pugnaxque Metellus
Ut videt ingenti Saturnia templa revelli
Mole, rapit gressus ; et Cæsaris agnina rumpens,
Ante fores nondum reseratæ conslitit ædis :
{Lisque adeo solus fcrrum, mortemque tinere
Auri nescit amor! pereunt discrimine nullo
Amissæ loges; sed, pars vilissima rerum,
Certamen morvistis, opes} prohibensque rapina
Victorem, clara testatur voec tribunus :

« Non nisi per nostrum vobis percussa patebunt
Templa latus, nullasque feres, nisi sanguine sacro
Sparsus raptor opes. Gerte vrola{a potestas
Invenii isla Deos ; Crassumque in bella sequutæ
Sæva tribunitiæ voverunt prolia diræ.
Detege jam ferrum - neque enim tibi turba verenda est.
Spectatris scelerum : deserta stamus in Erhe.
Non feret e nostro sceleratus præmia miles.
Sunt quos prosternas populi. que mænia dones.
Pacis ad exhaustæ spolium non cogit egestas :
Bellum Cæsar habes. » His magnam victor in iram