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LIVRE DEUXIÈME

Ces feux que des Etnas vomissent les fureurs ;
Elle possède enfin les semences des fleurs
Et des blondes moissons, les germes des feuillages
Mouvants, des fruits heureux et des frais pâturages :
De quoi sustenter l’homme et les bêtes des monts.
Ce n’est donc pas à tort que nous la proclamons
Mère auguste des dieux, des hommes et des êtres,
Et qu’elle est apparue aux chantres grecs nos maîtres
Haut montée en un char traîné par deux lions.
Car la terre, pendante au sein des régions
Célestes, ne saurait s’asseoir sur elle-même ;
Et ses lions domptés sont l’évident emblème
Des cœurs durs amollis par les soins maternels.
620Les cités qu’elle abrite en des forts naturels
À son front ont valu la couronne murale
Qui de loin aux terreurs populaires signale
Son marbre solennel en triomphe porté.
De là son culte antique et partout respecté.
Ses prêtres et son nom rappellent la Phrygie,
Où les traditions veulent que sa magie
Pour le donner au monde ait évoqué le blé.
Ces galles furieux, cortège mutilé,
Semblent crier : enfants ingrats envers vos pères,
Insensés contempteurs du culte de vos mères,
Vous ne méritez plus d’engendrer des humains !
Et la peau des tambours tonne au choc de leurs mains,
Et la cymbale éclate, et les cornets farouches
Avec le fifre aigu glapissent sous les bouches ;
Le mode phrygien exalte leur fureur ;
La pique au bras, joyeux, ils courent ; et l’horreur