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DE LA NATURE DES CHOSES

Au travers, poursuivant son chemin dans l’espace.
La vitesse en marchant s’accroît ; l’impulsion
Acquise en un long vol s’ajoute à l’action,
Et, fondant, emportant dans la même traînée
Les éléments épars de la matière ignée,
Germes aériens dont le choc répété
Peut-être active encor tant de célérité,
Fait le trait plus rigide et le coup plus terrible.

Maint corps frappé demeure intact ; comme en un crible,
Le fluide subtil glisse et fuit au travers.
Mais lorsque d’autres corps plus serrés, moins ouverts,
Ont opposé leur masse aux pointes de la foudre,
Par cette force intense ils sont réduits en poudre.
Sur l’heure, l’airain fond, l’or s’amollit et bout ;
360La flamme déliée y plonge coup sur coup
Ses dards faits de substance impalpable et polie ;
La trame se relâche et le nœud se délie ;
Les corps s’ouvrent, dissous par la brusque chaleur.

C’est vers l’automne, ou quand le printemps est en fleur,
Que le ciel, haut séjour des astres, et la terre
Tremblent le plus souvent sous le vol du tonnerre.
L’hiver manque de feux ; l’été n’a point de vents
Qui puissent condenser les nuages mouvants.
Le concours d’éléments où la foudre s’aiguise
Ne se voit qu’aux saisons moyennes, temps de crise
Où, comme deux courants jetés en un détroit,
S’engouffrent confondus la chaleur et le froid.
Pour que la foudre éclate, il faut la double rage