Page:Luzel - Contes bretons, Clairet, 1870.djvu/101

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
− 73 −

cour, le prit pour son mari, et, descendant l’escalier au plus vite, elle vint se jeter dans ses bras, en criant :

Te voilà donc, mon pauvre époux ! Dieu, que tu m’as causé du chagrin ! Je craignais que tu ne fusses allé dans la cour de derrière du château, car de là personne ne revient ! —

Celui-ci vit bien qu’on le prenait pour son frère, et il dit :

— Je m’étais égaré dans le bois, je ne sais comment ; mais je n’ai pas éprouvé de mal.

Et la joie de renaître dans le château, au milieu de la plus grande affliction ! —

Quand l’heure du repas fût venue ils mangèrent à la même table, puis, ils montèrent ensemble à leur chambre à coucher. Avant de se mettre au lit, le jeune homme plaça son épée nue entre la femme de son frère et lui.

— Pourquoi donc fait-il cela ? — se disait en elle-même la jeune femme, étonnée.

Le fils du pécheur, qui tremblait d’être reconnu, dit qu’il était accablé de fatigue et qu’il voulait dormir. Mais la jeune femme ne cessait de l’interroger, lui demandant comment il avait passé son temps, depuis son absence, et beaucoup d’autres choses. — Il était bien embarrassé, vous le pensez bien, et ne savait que répondre, le plus souvent. Il demanda aussi pourquoi toutes les portes et les fenêtres étaient closes dans tout un côté du château.

— Mais je te l’ai déjà dit ; tu ne te le rappelles donc pas ? —

— Non sûrement ; je l’ai oublié. —