Page:Luzel - Contes populaires, volume 1, 1887.djvu/390

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Ce qu'elle a répondu ? Je n'ose pas vous le dire.

— Dites-moi, vite.

— Elle a dit, la mauvaise fille, qu'elle ne céderait une de ses boules que pour dormir une nuit avec votre mari.

— Voyez donc! Mais, n'importe, il faut que j'aie une de ses boules, coûte que coûte ; je mettrai un narcotique dans le vin de mon mari, pendant le souper, et il ne saura rien. Allez lui dire que j'accepte la condition, et apportez-moi une boule d'or.

En se levant de table, le soir, le seigneur fut pris d'un besoin si impérieux de dormir, qu'il lui fallut aller se mettre au lit aussitôt. Peu après, on introduisit la bergère dans sa chambre. Mais, elle avait beau l'appeler des noms les plus tendres, l'embrasser, le secouer fortement, rien ne pouvait le réveiller.

— Hélas ! s'écriait alors la pauvre femme, en pleurant, j'aurai donc perdu toute ma peine ? Après avoir tant souffert ! Je t'avais cependant épousé, quand tu étais crapaud, et que personne ne voulait de toi ! Et pendant deux longues années, par la chaleur, par le froid le plus cruel, sous la pluie, la neige, au milieu de la tempête, je t'ai cherché partout, sans perdre courage ; et maintenant, que je t'ai retrouvé, tu ne m'écoutes