Page:Luzel - Contes populaires, volume 1, 1887.djvu/43

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— Retournons, à présent, à la maison, dit au prince son beau-frère.

Et ils s’en retournèrent. Mais, ils ne revirent plus les choses extraordinaires qu’ils avaient vues d’abord, et, chemin faisant, le prince demanda à son beau-frère l’explication de tout cela. Alors, il lui parla de la sorte :

— A présent, je puis parler, et voici ce que signifie tout ce que vous avez vu : Les deux vaches grasses et luisantes, sur la lande aride, où il n’y avait que de la bruyère, de maigres ajoncs et des pierres, sont de pauvres gens qui vivaient honnêtement, quand ils étaient sur la terre, donnaient l’aumône, quoique pauvres, et étaient contents de leur condition, et, à présent, ils sont sauvés. Les deux vaches maigres et décharnées, au milieu d’un excellent pâturage, étaient des gens riches, qui ne faisaient qu’amasser des richesses et convoiter le bien de leurs voisins, ne donnant pas l’aumône au pauvre, et, quoique riches, ils étaient malheureux. Ils étaient, là où vous les avez vus, dans le purgatoire, et, pour leur pénitence, ils se trouvaient au milieu de l’herbe haute et grasse, sans pouvoir en manger. Les deux chèvres qui se battaient avec tant d’acharnement, dans la chemin étroit et profond, étaient deux voleurs, qui ne cherchaient que noise et bataille, et Dieu, pour les punir, les