Page:Luzel - Contes populaires, volume 3, 1887.djvu/408

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— Nous n’avons plus un morceau de lard à la maison ; l’argent, pour en avoir, nous manque également ; notre vache et son veau et la chèvre et les poules ont été vendus ou mangés ; notre maison et les deux courtils ne sont également plus à nous : il ne nous reste donc qu’à quitter le pays et à aller chercher du pain ailleurs.

— Oui, dit Jeanne, allons chercher du pain ailleurs.

Jean avait la mort dans l’âme et les larmes aux yeux, en quittant la chaumière, et il dit à Jeanne, qui le suivait :

— Tire la porte sur toi.

— C’est bien, dit Jeanne.

Et elle enleva la porte de ses gonds et la chargea sur son dos.

Jean marchait devant, triste et soucieux ; Jeanne venait après lui, et gémissait et s’attardait. Jean se détourna, en l’entendant se plaindre et souffler, et son étonnement fut grand de voir qu’elle portait la porte de leur chaumière sur son dos.

— Pourquoi diable portes-tu cette porte sur ton dos ? lui demanda-t-il.

— Pourquoi ?... Ne m’avez-vous pas dit de tirer la porte sur moi ?

— Oui, de la fermer après toi, ma pauvre femme !

— Dam ! est-ce que je pouvais savoir ça, moi ?