Page:Mérimée - Carmen.djvu/25

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pensées. Déjà la vieille s’était couchée dans un coin de la salle, à l’abri d’une couverture trouée tendue sur une corde. La petite fille l’avait suivie dans cette retraite réservée au beau sexe. Mon guide alors, se levant, m’invita à le suivre à l’écurie ; mais, à ce mot, don José, comme réveillé en sursaut, lui demanda d’un ton brusque où il allait.

— À l’écurie, répondit le guide.

— Pour quoi faire ? les chevaux ont à manger. Couche ici, Monsieur le permettra.

— Je crains que le cheval de Monsieur ne soit malade ; je voudrais que Monsieur le vît : peut-être saura-t-il ce qu’il faut lui faire.

Il était évident qu’Antonio voulait me parler en particulier ; mais je ne me souciais pas de donner des soupçons à don José, et, au point où nous en étions, il me semblait que le meilleur parti à prendre était de montrer la plus grande confiance. Je répondis donc à Antonio que je n’entendais rien aux chevaux, et que j’avais envie de dormir. Don José le suivit à l’écurie, d’où bientôt il revint seul. Il me dit que le cheval n’avait rien, mais que mon guide le trouvait un animal si précieux, qu’il le frottait avec sa veste pour le faire transpirer, et qu’il comptait passer la nuit dans cette douce