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L’ÉCOLE CLASSIQUE

La Solitude


DANS ce val solitaire et sombre,
Le cerf qui brame au bruit de l’eau,
Penchant ses yeux dans un ruisseau,
S’amuse à regarder son ombre.

De cette source une Naïade,
Tous les soirs, ouvre le portal
De sa demeure de cristal,
Et nous chante une sérénade.

Les Nymphes, que la chasse attire
À l’ombrage de ces forêts,
Cherchent les cabinets secrets,
Loin de l’embûche du satyre…

Un froid et ténébreux silence
Dort à l’ombre de ces ormeaux,
Et les vents battent les rameaux
D’une amoureuse violence…

Ici, l’Amour fait ses études ;
Vénus y dresse des autels ;
Et les visites des mortels
Ne troublent point ces solitudes…

Corinne, je te prie, approche ;
Couchons-nous sur ce tapis vert,
Et, pour être mieux à couvert,
Entrons au creux de cette roche…

Mon Dieu ! que tes cheveux me plaisent !
Ils s’ébattent dessus ton front,
Et, les voyant beaux comme ils sont,
Je suis jaloux quand ils te baisent…