Page:Maupassant - Œuvres posthumes, I, OC, Conard, 1910.djvu/149

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
137
LE COLPORTEUR.

Il me pilota par les épaules, dans une obscurité profonde, vers un escalier que je cherchais des pieds et des mains, avec la peur légitime de tomber dans un trou de cave.

Quand j’eus rencontré la première marche, il me dit :

— Montez, c’est au sixième.

En fouillant dans ma poche, j’y découvris une boîte d’allumettes-bougies, et j’éclairai cette ascension. Il me suivait en soufflant sous son sac, répétant :

— C’est haut ! c’est haut !

Quand nous fûmes au sommet de la maison, il chercha sa clef, attachée avec une ficelle dans l’intérieur de son vêtement, puis il ouvrit sa porte et me fit entrer.

C’était une chambre peinte à la chaux, avec une table au milieu, six chaises et une armoire de cuisine contre les murs.

— Je vais réveiller ma femme, dit-il, puis je descendrai à la cave chercher du vin ; il ne se garde pas ici.

Il s’approcha d’une des deux portes qui donnaient dans cette première pièce et il appela :

— Bluette ! Bluette !

Bluette ne répondit pas. Il cria plus fort :

— Bluette ! Bluette !

Puis, tapant sur la planche à coups de poing, il murmura :

— Te réveilleras-tu, nom de nom !

Il attendit, colla son oreille à la serrure et reprit, calme :

— Bah ! faut la laisser dormir si elle dort. Je vas chercher le vin, attendez-moi deux minutes.

Il sortit. Je m’assis résigné.

Qu’étais-je venu faire là ? Soudain, je tressaillis. Car