Page:Maupassant - Contes du jour et de la nuit 1885.djvu/108

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— Alors vous connaissez du monde à Nancy ?

— Mais oui, presque tout le monde.

— La famille de Sainte-Allaize ?

— Oui, très bien ; c’étaient des amis de mon père.

— Comment vous appelez-vous ?

Je dis mon nom. Elle me regarda fixement, puis prononça, de cette voix basse qu’éveillent les souvenirs :

— Oui, oui, je me rappelle bien. Et les Brisemare, qu’est-ce qu’ils sont devenus ?

— Tous sont morts.

— Ah ! Et les Sirmont, vous les connaissiez ?

— Oui, le dernier est général.

Alors elle dit, frémissante d’émotion, d’angoisse, de je ne sais quel sentiment confus, puissant et sacré, de je ne sais quel besoin d’avouer, de dire tout, de parler de ces choses qu’elle avait tenues jusque-là enfermées au fond de son cœur, et de ces gens dont le nom bouleversait son âme :

— Oui, Henri de Sirmont. Je le sais bien. C’est mon frère.