Page:Maupassant - Le Rosier de Madame Husson.djvu/257

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mant de voyager avec l’éternel espoir de l’amour qui rôde ? Que vais-je rencontrer, dans cet hôtel, tout à l’heure, ou sur la croisette, ou dans la rue peut-être ? Où est-elle, celle qui m’aimera demain et que j’aimerai ? Comment seront ses yeux, ses lèvres, ses cheveux, son sourire ? Comment sera-t-elle, la première femme qui me tendra sa bouche et que j’envelopperai dans mes bras ? Brune ou blonde ? grande ou petite ? rieuse ou sévère ? grasse ou ?… Elle sera grasse !

Oh ! comme je plains ceux qui ne connaissent pas, qui ne connaissent plus le charme exquis de l’attente ? La vraie femme que j’aime moi, c’est l’Inconnue, l’Espérée, la Désirée, celle qui hante mon cœur sans que mes yeux aient vu sa forme, et dont la séduction s’accroît de toutes les perfections rêvées. Où est-elle ? Dans cet hôtel, derrière cette porte ? Dans une des chambres de cette maison, tout près, ou loin encore ? Qu’importe, pourvu que je la désire, pourvu que je sois certain de la rencontrer ! Et je la rencontrerai assurément aujourd’hui ou demain, cette