Page:Maupassant - Les Sœurs Rondoli.djvu/300

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Châli ne me quittait plus, sauf quand j’allais chez le prince.

Nous passions des heures exquises ensemble dans les ruines du vieux palais au milieu des singes devenus nos amis.

Elle se couchait sur mes genoux et restait là roulant des choses en sa petite tête de sphinx, ou peut-être ne pensant à rien, mais gardant cette belle et charmante pose héréditaire de ces peuples nobles et songeurs, la pose hiératiques des statues sacrées.

J’avais apporté dans un grand plat de cuivre des provisions, des gâteaux, des fruits. Et les guenons s’approchaient peu à peu, suivies de leurs petits plus timides ; puis elles s’asseyaient en cercle autour de nous, n’osant approcher davantage, attendant que je fisse ma distribution de friandises.

Alors presque toujours un mâle plus hardi s’en venait jusqu’à moi, la main tendue comme un mendiant ; et je lui remettais un morceau qu’il allait porter à sa femelle. Et toutes les autres se mettaient à pousser des cris furieux, des cris de jalousie et de colère, et je ne pouvais faire cesser cet affreux vacarme qu’en jetant sa part à chacune.

Me trouvant fort bien dans ces ruines, je voulus y