Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/77

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êtes bien l’enfant que je cherche depuis tantôt quinze ans. Je suis un ancien ami de votre famille que des circonstances, inutiles à vous dire maintenant, ont longtemps éloigné de la France où vous restiez pendant ce temps-là sans protecteur et sans appui. Ah ! que de larmes j’ai versées sur le sort de votre mère que j’ai connue si jeune et si belle, pauvre enfant !

Grâce à un hasard providentiel, je sais, relativement à votre naissance, des secrets que vous ignorez. Je suis vivant, Dieu merci ! et ne vous laisserai pas plus longtemps dans le triste état où je vous retrouve. Apprenez donc que vous n’êtes pas sans fortune et que vous avez droit à une succession importante que je saurai vous faire retrouver.

― Comprends-tu ma surprise, et je dirai presque mon attendrissement, en entendant ce récit ?

― Attends ! dit Georges en l’interrompant, cet homme ne porte-t-il pas des lunettes bleues ?

― Du tout, répondit Karl, c’est un gros homme à l’air bon enfant, et qui m’a inspiré beaucoup de confiance.

― Cela n’a en effet aucun rapport, se dit Georges à lui-même en repoussant le rapprochement qu’il avait fait tout à coup entre le visiteur de Karl Elmerich et le négociateur matrimonial de d’Havrecourt. L’un est vieux, l’autre jeune encore ; le premier est brutal, le second est doucereux. Et, d’ailleurs, je me souviens que, dans l’histoire de d’Havrecourt, il s’agissait, comme héritier, d’une vieille fille.

― Eh bien ! la suite de l’histoire, voyons ? reprit Georges singulièrement intéressé par ce récit inattendu.

― J’arrive à la fin : il m’a dit que, dans l’intérêt de