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craché, à l’Hôtel de Ville, au visage de M. Jules Favre, sans défense et prisonnier à l’Hôtel de Ville[1]. »




De 1863 à 1864, l’esprit public, engourdi dans la vapeur de sang du 2 décembre, semble se réveiller.

Depuis 1860, je suis entré dans la vie politique par le barreau ; j’ai commencé à comprendre, à analyser l’empire. Dès que mon esprit se porte pendant quelque temps sur un sujet, j’en éclaire le fond ; cela tient aux vastes travaux de préparation générale que j’ai faits avant de m’être mis à écrire une ligne.

Je débutai en 1862 par une polémique des plus vives, dans mon département, contre le préfet, M. Nau de Beauregard ; le président du conseil général, M. Dalloz, et le vice-président de ce même conseil, M. le comte de Broissia[2].

Je n’ai jamais ménagé le peu d’argent que j’ai gagné quand il s’est agi de combattre les gens de l’Empire. Cinq ou six fois par an, sur des questions d’impôt, de budget départemental, d’endiguement, etc., je lançais de Paris dans le département du Jura des imprimés adressés aux Jurassiens, dans lesquels je tympanisais l’administration départementale du Jura. Cela dura deux ans ; et quelques personnes peuvent se souvenir encore de l’effet que produisit en 1863 une satyre que j’avais intitulée : Géographie politique du Jura, où j’essayais de réveiller mon pays endormi, par le souvenir des vieilles libertés francomtoises.

À cette époque, M. Grévy dormait du plus profond sommeil, comme toujours. Il se reposait depuis dix ans sur son amendement, dont l’idée est due à M. Leblond, et il a rajeuni sa renommée dans les dix dernières années qui viennent de s’écouler, par son mot ni dupes ni complices. La démocratie et les journaux font parfois des réputations à bon marché.



  1. On m’affirme que M. de Villemessant a contribué à déterminer mon arrestation en venant se plaindre de la manière dont je l’avais traité dans une affiche ; je n’en veux pas croire un mot. Il est évident que je n’ai été arrêté que d’ordre de M. Ferry et pour crime de lèse-majesté envers sa personne.
  2. C’est ce même de Broissia qui, candidat libéral ou soi-disant tel en 1869, s’est fait payer, par une recette particulière, de 17,000 fr., son désistement à une candidature d’opposition dans le département du Jura, en faveur d’un M. Huot, ancien député.