Page:Maurois - Les Silences du colonel Bramble (Grasset 1918).djvu/120

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— Oh ! non, je les aime point.

— Alors, que vas-tu faire de tes deux sous ?

— Les mettre dans ma tirelire jusqu’à ce qu’il y en ait assez pour prendre un livret de caisse d’épargne ; puis, quand je serai grand, j’achèterai de la terre.

Le même soir, Aurelle cita cette réponse à Lucie et à Berthe, pensant les divertir. Il sentit vite qu’il n’amusait personne : ces plaisanteries sur l’argent étaient sacrilèges. Le cabaretier, pour remettre les choses au point, raconta une petite histoire morale.

— Quand j’étais jeune, dit-il, je faisais souvent des courses à la ville pour M. le curé, et chaque fois il me donnait deux sous que je rapportais à mon père. Mais au bout de quelque temps, M. le curé prit l’habitude de me faire transmettre ses commissions par la vieille Sophie, sa servante, et elle ne me donna plus mes deux sous. Mon père, qui