fais tous mes compliments ; vous avez plus de succès à Beau- séjour que M. l’abbéJudule. L’abbé Picquenet parut heureux : « Je sais maintenant, dit-il, comment il faut parler à ces braves gens. » —
Il ne faudrait cependant pas vous illusionner, monsieur l’abbé, reprit M. de La Musardière ; Charlou,croyez-moi, n’en criera pas moins à l’occasion : « A bas la calottel » sous les fenêtres de votre presbytère. Mais son succès portait M. l’abbé Picquenet à l’optimisme. — Je reproche à la République ses lois sectaires, dit-il, en se levant pour prendre congé ; mais si lesélections pro chaines changeaient les députés, la République pourrait deve nir un bon gouvernement... Monsieur le comte,je crois,déci dément, qu’il faut, en dépit de tout, être républicain. M. de La Musardière sourit avec ironie ; puis il voulut accompagner l’abbé jusqu’à la porte du parc. Au moment où celui-ci allait le quitter, il le retint encore, durant un instant, pour lui parler de sa fille : — Monsieur le curé, Lucile m’inquiète, malgré que je n’en veuille rien laisser croire eu présence de sa mère. Elle con serve, paraît-il, une tristesse qui me préoccupe. Vous savez qu’elle a voulu se retirer auprès de sa tante. Mu# de Phocans nous a écrit; elle aussi s’inquiète de la santé de sa nièce. — M,,e Lucile semblait, cependant, la dernière fois qae je l’ai vue, jouir d’une excellente santé, répondit l’abbé.
— Il paraît, reprit M. de La Musardière, qu’elle continue de grossir d’une manière anormale ; j’en augure mal pour son âge mûr. Je désirais, à ce sujet, consulter notre médecin, avant son départ, mais elle n’a rien voulu entendre.
— L’hiver qu’elle passera auprès de Mlle de Phocans, répondit l’abbé Picquenet, lui sera, croyez-moi, excellent pour sa vie spirituelle. Mlle de Phocans est, m’a-t-on dit, fort absorbée par sa piété ; Mlle Lucile reviendra de ce séjour rassérénée et plus pieuse. Ensuite, la Providence lui fera rencontrer un mari digne d’elle, comme elle le fit pour M,,e Christine. Ils étaient arrivés à la grille du château. M . l ’abbé Picque net tendit la main à M. de La Musardière. La grille roula sur ses gonds avec un grincement. Le prêtre s’éloigna. C ’était vers la tombée du soir. Un chien, au loin, aboya longuement ; d’autres lui répondirent. Les fenêtres de Beauséjour s’éclairaient.
(À suivre.)