Page:Milton - Le Paradis perdu, trad. de Chateaubriand, Renault et Cie, 1861.djvu/170

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jouit ; il répara bientôt la brèche de sa muraille, en retournant au lieu d’où il s’était replié.

« Seul vainqueur par l’expulsion de ses ennemis, le Messie ramena son char de triomphe. Tous ses saints, qui silencieux furent témoins oculaires de ses actes tout-puissants, pleins d’allégresse au-devant de lui s’avancèrent ; et dans leur marche, ombragés de palmes, chaque brillante hiérarchie chantait le triomphe, le chantait, lui, Roi victorieux, Fils, Héritier et Seigneur. À lui tout pouvoir est donné ; de régner il est le plus digne !

« Célébré, il passe triomphant au milieu du ciel, dans les parvis et dans le temple de son Père tout-puissant élevé sur un trône ; son Père le reçut dans la gloire où maintenant il est assis à la droite de la béatitude.

« C’est ainsi que (mesurant les choses du ciel aux choses de la terre), à ta demande, ô Adam, et pour que tu sois en garde par ce qui s’est passé, je t’ai révélé ce qui autrement aurait pu demeurer caché à la race humaine : la discorde survenue et la guerre dans le ciel entre les puissances angéliques, et la chute profonde de ceux qui, aspirant trop haut, se révoltèrent avec Satan : il est maintenant jaloux de ton état, et complote pour te détourner aussi de l’obéissance, afin qu’avec lui privé de félicité, tu partages son châtiment, l’éternelle misère. Ce serait toute sa consolation et sa vengeance s’il pouvait, comme une peine faite au Très-Haut, t’obtenir une fois pour compagnon de son malheur. Mais ne prête pas l’oreille à ses tentations ; avertis ta plus faible ; profite d’avoir appris d’un exemple terrible la récompense de la désobéissance : ils auraient pu demeurer fermes, cependant ils tombèrent : qu’il t’en souvienne, et crains de transgresser. »