Page:Milton - Le Paradis perdu, trad. de Chateaubriand, Renault et Cie, 1861.djvu/300

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boucs), ils en concluront que quelque sang plus précieux doit payer la dette humaine, celui du juste pour l’injuste, afin que dans cette justice à eux appliquée par la foi, ils trouvent leur justification auprès de Dieu et la paix de la conscience que la loi par des cérémonies ne peut calmer, puisque l’homme ne peut accomplir la partie morale de la loi, et que ne l’accomplissant pas il ne peut vivre.

« Ainsi la loi paraît imparfaite et seulement donnée pour livrer les hommes, dans la plénitude des temps, à une meilleure alliance ; pour les faire passer, disciplinés, de l’ombre des figures à la vérité, de la chair à l’esprit, de l’imposition des lois étroites à la libre acceptation d’une large grâce, de la servile frayeur à la crainte filiale, des œuvres de la loi aux œuvres de la foi.

« À cause de cela, Moïse (quoique si particulièrement aimé de Dieu), n’étant que le ministre de la loi, ne conduira pas le peuple dans Chanaan : ce sera Josué, appelé Jésus par les Gentils ; Jésus qui aura le nom et fera l’office de celui qui doit dompter le serpent ennemi, et ramener en sûreté à l’éternel paradis du repos, l’homme longuement égaré dans la solitude du monde.

« Cependant, placés dans leur Chanaan terrestre, les Israélites y demeureront et y prospéreront longtemps ; mais quand les péchés de la nation auront troublé leur paix publique, ils provoqueront Dieu à leur susciter des ennemis dont il les délivrera aussi souvent qu’ils se montreront pénitents, d’abord au moyen des juges, ensuite par des rois ; le second desquels (renommé pour sa piété et ses grandes actions), recevra la promesse irrévocable que son trône subsistera à jamais. Toutes les prophéties chanteront de même, que de la souche royale de David (j’appelle ainsi ce roi) sortira un Fils, ce Fils de la race de la femme, à toi prédit, prédit à Abraham comme celui en qui espèrent toutes les nations, celui qui est prédit aux rois, des rois le dernier, car son règne n’aura point de fin. « Mais d’abord passera une longue succession de rois : le pre-