Page:Mirbeau - Le Journal d’une femme de chambre.djvu/272

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— Mais où trouvez-vous toutes ces merveilles ?… demanda Mme de Rambure…

— À Versailles… répondit Sartorys, chez de poétiques douairières et de sentimentales chanoinesses. On n’imagine pas ce qu’il y a de trésors cachés chez ces vieilles dames.

Mme de Rambure insista :

— Pour les décider à vous les vendre, que leur faites-vous donc ?

Cynique et joli, cambrant son buste mince, il répliqua, avec le visible désir d’étonner :

— Je leur fais la cour… et, ensuite, je me livre sur elles à des pratiques anti-naturelles.

On se récria sur l’audace du propos, mais comme on pardonnait tout à Sartorys, chacun prit le parti d’en rire.

— Qu’appelez-vous des pratiques anti-naturelles ?… interrogea, sur un ton dont l’ironie s’aggravait d’une intention polissonne, un peu lourde, la baronne Gogsthein, qui se plaisait aux situations scabreuses.

Mais, sur un regard de Kimberly, Lucien Sartorys s’était tu… Ce fut Maurice Fernancourt qui, se penchant sur la baronne, dit gravement :

— Cela dépend de quel côté Sartorys place la nature…

Toutes les figures s’éclairèrent d’une gaieté nouvelle… Enhardie par ce succès, Mme Charrigaud, interpellant directement Sartorys qui pro-