Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/493

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Sosie
Si vous le prenez sur ce ton,
Monsieur, je n’ai plus rien à dire,
Et vous aurez toujours raison.

Amphitryon
Quoi ? tu veux me donner pour des vérités, traître,
Des contes que je vois d’extravagance outrés ?

Sosie
Non : je suis le valet, et vous êtes le maître ;
Il n’en sera, Monsieur, que ce que vous voudrez.

Amphitryon
Çà, je veux étouffer le courroux qui m’enflamme,
Et tout du long ouïr sur ta commission.
Il faut, avant que voir ma femme,
Que je débrouille ici cette confusion.
Rappelle tous tes sens, rentre bien dans ton âme,
Et réponds, mot pour mot, à chaque question.

Sosie
Mais, de peur d’incongruité,
Dites-moi, de grâce, à l’avance,
De quel air il vous plaît que ceci soit traité.
Parlerai-je, Monsieur, selon ma conscience,
Ou comme auprès des grands on le voit usité ?
Faut-il dire la vérité,
Ou bien user de complaisance ?
Amphitryon
Non : je ne te veux obliger
Qu’à me rendre de tout un compte fort sincère.

Sosie
Bon, c’est assez ; laissez-moi faire :
Vous n’avez qu’à m’interroger.

Amphitryon
Sur l’ordre que tantôt je t’avais su prescrire…

Sosie
Je suis parti, les cieux d’un noir crêpe voilés,
Pestant fort contre vous dans ce fâcheux martyre,
Et maudissant vingt fois l’ordre dont vous parlez.

Amphitryon
Comment, coquin ?

Sosie
Comment, coquin ? Mons