Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/500

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me flatter en moi-même
Que loin de vous j’aurais trop demeuré.
L’attente d’un retour ardemment désiré
Donne à tous les instants une longueur extrême,
Et l’absence de ce qu’on aime,
Quelque peu qu’elle dure, a toujours trop duré.

Alcmène
Je ne vois…

Amphitryon
Je ne vois… Non, Alcmène, à son impatience
On mesure le temps en de pareils états ;
Et vous comptez les moments de l’absence
En personne qui n’aime pas.
Lorsque l’on aime comme il faut,
Le moindre éloignement nous tue,
Et ce dont on chérit la vue
Ne revient jamais assez tôt.
De votre accueil, je le confesse,
Se plaint ici mon amoureuse ardeur,
Et j’attendais de votre cœur
D’autres transports de joie et de tendresse.

Alcmène
J’ai peine à comprendre sur quoi
Vous fondez les discours que je vous entends faire ;
Et si vous vous plaignez de moi,
Je ne sais pas, de bonne foi,
Ce qu’il faut pour vous satisfaire.
Hier au soir, ce me semble, à votre heureux retour,
On me vit témoigner une joie assez tendre,
Et rendre aux soins de votre amour
Tout ce que de mon cœur vous aviez lieu d’attendre.

Amphitryon
Comment ?

Alcmène
Comment ? Ne fis-je pas éclater à vos yeux
Les soudains mouvements d’une entière allégresse ?
Et le transport d’un cœur peut-il s’expliquer mieux,
Au retour d’un époux qu’on aime avec tendresse ?

Amphitryon
Que me dites-vous là ?

Alcmène
Que me dites-vou