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Harpagon

Maître Jacques.

Valère, à maître Jacques.

C’est toi qui le dis ?

Maître Jacques

Vous voyez que je ne dis rien.

Harpagon

Oui. Voilà monsieur le commissaire qui a reçu sa déposition.

Valère

Pouvez-vous me croire capable d’une action si lâche ?

Harpagon

Capable ou non capable, je veux ravoir mon argent.


Scène VI.

HARPAGON, ANSELME, ÉLISE, MARIANE, CLÉANTE, VALÈRE, FROSINE, UN COMMISSAIRE, MAÎTRE JACQUES, LA FLÈCHE.
Cléante

Ne vous tourmentez point, mon père, et n’accusez personne. J’ai découvert des nouvelles de votre affaire ; et je viens ici pour vous dire que, si vous voulez vous résoudre à me laisser épouser Mariane, votre argent vous sera rendu[1].

Harpagon

Où est-il ?

Cléante

Ne vous mettez point en peine. Il est en lieu dont je réponds ; et tout ne dépend que de moi. C’est à vous de me dire à quoi vous vous déterminez ; et vous pouvez choisir, ou de me donner Mariane, ou de perdre votre cassette.

Harpagon

N’en a-t-on rien ôté ?

Cléante

Rien du tout. Voyez si c’est votre dessein de souscrire à ce mariage, et de joindre votre consentement à celui de sa mère, qui lui laisse la liberté de faire un choix entre nous deux.

  1. Ainsi le vol de la cassette n’est qu’un moyen d’obtenir le consentement d’Harpagon au mariage des deux amants. Voilà ce que n’a pas vu Rivarol lorqu’il a dit : Le voleur n’est pas assez bien défini dans l’Harpagon de Molière, et le vol n’y est pas assez mis au rang des crimes. C’est qu’en vérité il n’y a pas vol réel dans la pièce, mais seulement simulation de vol. Dans la comédie des Esprits, de Larivey, le vol des deux mille écus n’est aussi qu’un vol simulé pour déterminer le vieux Séverin à consentir à un mariage. (Aimé Martin.)