Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/383

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Contester sur leurs agréments
Avec l'or et les pierreries,
1160 Vous n'entendrez que des concerts charmants,
De cent beautés vous y serez servie,
Qui vous adoreront sans vous porter envie,
Et brigueront à tous moments
D'une âme soumise et ravie
1165 L'honneur de vos commandements.

PSYCHÉ
Mes volontés suivent les vôtres,
Je n'en saurais plus avoir d'autres;
Mais votre oracle enfin vient de me séparer
De deux sœurs, et du Roi mon père,
1170 Que mon trépas imaginaire
Réduit tous trois à me pleurer.
Pour dissiper l'erreur dont leur âme accablée
De mortels déplaisirs se voit pour moi comblée,
Souffrez que mes sœurs soient témoins
1175 Et de ma gloire et de vos soins.
Prêtez-leur comme à moi les ailes du Zéphire,
Qui leur puissent de votre empire
Ainsi qu'à moi faciliter l'accès;
Faites-leur voir en quels lieux je respire,
1180 Faites-leur de ma perte admirer le succès.

L'AMOUR
Vous ne me donnez pas, Psyché, toute votre âme:
Ce tendre souvenir d'un père et de deux sœurs
Me vole une part des douceurs
Que je veux toutes pour ma flamme.
1185 N'ayez d'yeux que pour moi, qui n'en ai que pour vous,
Ne songez qu'à m'aimer, ne songez qu'à me plaire,
Et quand de tels soucis osent vous en distraire...

PSYCHÉ
Des tendresses du sang peut-on être jaloux?

L'AMOUR
Je le suis, ma Psyché, de toute la nature.
1190 Les rayons du soleil vous baisent trop souvent,
Vos cheveux souffrent trop les caresses du vent,
Dès qu'il les flatte, j'en murmure;
L'air même que vous respirez
Avec trop de plaisir passe par votre bouche,