Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/390

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Plus il me voit, plus je lui plais,
Il n'est point de plaisirs dont l'âme soit charmée
Qui ne préviennent mes souhaits,
1380 Et je vois mal de quoi la vôtre est alarmée,
Quand tout me sert dans ce palais.

AGLAURE
Qu'importe qu'ici tout vous serve,
Si toujours cet amant vous cache ce qu'il est?
Nous ne nous alarmons que pour votre intérêt.
1385 En vain tout vous y rit, en vain tout vous y plaît,
Le véritable amour ne fait point de réserve,
Et qui s'obstine à se cacher,
Sent quelque chose en soi qu'on lui peut reprocher.
Si cet amant devient volage,
1390 Car souvent en amour le change est assez doux,
Et j'ose le dire entre nous,
Pour grand que soit l'éclat dont brille ce visage,
Il en peut être ailleurs d'aussi belles que vous.
Si, dis-je, un autre objet sous d'autres lois l'engage,
1395 Si dans l'état où je vous voi,
Seule en ses mains, et sans défense,
Il va jusqu'à la violence,
Sur qui vous vengera le Roi
Ou de ce changement, ou de cette insolence?

PSYCHÉ
1400 Ma sœur, vous me faites trembler.
Juste Ciel! pourrais-je être assez infortunée...

CIDIPPE
Que sait-on si déjà les nœuds de l'hyménée...

PSYCHÉ
N'achevez pas, ce serait m'accabler.

AGLAURE
Je n'ai plus qu'un mot à vous dire.
1405 Ce prince qui vous aime, et qui commande aux vents,
Qui nous donne pour char les ailes du Zéphire,
Et de nouveaux plaisirs vous comble à tous moments,
Quand il rompt à vos yeux l'ordre de la nature,
Peut-être à tant d'amour mêle un peu d'imposture,
1410 Peut-être ce palais n'est qu'un enchantement,
Et ces lambris dorés, ces amas de richesses
Dont il achète vos tendresses,