Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/552

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LES FEMMES SAVANTES.

Trissotin.
Le sonnet donc vous semble…

Philaminte.
Le sonnet donc vous semble… Admirable, nouveau :
Et personne jamais n’a rien fait de si beau.

Bélise.
Quoi ! sans émotion pendant cette lecture !
Vous faites là, ma nièce, une étrange figure !

Henriette.
Chacun fait ici-bas la figure qu’il peut,
Ma tante ; et bel esprit, il ne l’est pas qui veut.

Trissotin.
Peut-être que mes vers importunent madame.

Henriette.
Point. Je n’écoute pas.

Philaminte.
Point. Je n’écoute pas. Ah ! voyons l’épigramme.

Trissotin.
Sur un carrosse de couleur amarante donné à une dame de ses amis.

Philaminte. Ces titres ont toujours quelque chose de rare.

Armande.
À cent beaux traits d’esprit leur nouveauté prépare.

Trissotin.
L’amour si chèrement m’a vendu son lien[1],

Bélise, Armande et Philaminte.
Ah !

Trissotin.
Qu’il m’en coûte déjà la moitié de mon bien ;
Et quand tu vois ce beau carrosse,
Où tant d’or se relève en bosse,
Qu’il étonne tout le pays,
Et fait pompeusement triompher ma Laïs…

Philaminte.
Ah ! ma Laïs ! voilà de l’érudition.

Bélise.
L’enveloppe est jolie, et vaut un million.

  1. Cette épigramme se trouve également dans les œuvres de Cotin ; elle porte ce titre : Madrigal sur un carrosse de couleur amarante, acheté pour une dame (Voyez Œuvres galantes de Cotin, seconde édition, 1765, I. II, p. 564,)