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DES ROMAINS, CHAP. I.

S’ils avaient rapidement conquis toutes les villes voisines, ils se seraient trouvés dans la décadence à l’arrivée de Pyrrhus, des Gaulois et d’Annibal, et, par la destinée de presque tous les états du monde, ils auraient passé trop vite de la pauvreté aux richesses et des richesses à la corruption.

Mais Rome, faisant toujours des efforts et trouvant toujours des obstacles, faisait sentir sa puissance sans pouvoir l’étendre, et, dans une circonférence très petite, elle s’exerçait à des vertus qui devaient être si fatales à l’univers.

Tous les peuples d’Italie n’étaient pas également belliqueux : les Toscans étaient amollis par leurs richesses et par leur luxe ; les Tarentins, les Capouans, presque toutes les villes de la Campanie et de la Grande-Grèce[1], languissaient dans l’oisiveté et dans les plaisirs. Mais les Latins, les Herniques, les Sabins, les Èques et les Volsques aimaient passionnément la guerre ; ils étaient autour de Rome ; ils lui firent une résistance inconcevable et furent ses maîtres en fait d’opiniâtreté.

Les villes latines étaient des colonies d’Albe qui furent fondées[2] par Latinus Sylvius. Outre une origine commune avec les Romains, elles avaient encore des rites communs, et Servius Tullius[3] les avait engagées à faire bâtir un temple dans Rome[4], pour être le centre de l’union des deux peuples. Ayant perdu une grande bataille auprès du lac

  1. A. Tous les peuples d'Italie n'étoient pas également belliqueux ; ceux qui tenoient la partie orientale comme les Tarentins et les Capouans, toutes les villes de la Campanie et la Grande-Grèce, etc.
  2. Comme on le voit dans le traité intitulé : Origo gentis Romanæ, qu’on croit être d’Aurélius Victor, ch. XVII. (M.)
  3. Denys d’Halicarnasse, liv. IV. (M.)
  4. C'était un temple de Diane, placé sur le sommet du mont Aventin.