Page:Moréas - Autant en emporte le vent, 1893.djvu/58

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
48
AUTANT EN EMPORTE LE VENT


Claire était la face de la Dame, telle la fine pointe
Du jour, et ses yeux étaient cieux marins ;
Claire était la face de la Dame et de parfums ointe.
Claire était la face de la Dame, et plus que purpurins
Fruits, fraîche était la bouche jointe
De la Dame. Et pour ses crins
Recercelés, ne fussent les entraves d’ivoire,
Eussent encourtiné ses reins.

C’était (tu dois bien t’en souvenir), c’était la plus bel-
le Dame de la cité.

Cieux marins étaient les yeux de la Dame et lacs que rehausse
La sertissure des neiges, et calice cependant.
Qu’il éclôt, était sa bouche ; et ni la blonde Isex, ni la fausse
Cressida, ni Hélène pour qui tant
De barons descendirent dans la fosse ;
Ni Florimel la fée, et ni l’ondine armée de son trident
Ni aucune mortelle ou déesse, telle beauté en sa force
Ne montrèrent, de l’aurore à l’occident,

C’était (tu dois bien t’en souvenir), c’était la plus bel-
le Dame de la cité.