Page:Moréas - Variations sur la vie et les livres, 1910.djvu/248

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pendant la nuit. En hiver, lorsqu’il manquait de bois, il travaillait dans son lit, et la peur des courants d’air lui faisait ajouter sa culotte à son bonnet.

Une fois, on le vit avec une barbe démesurée, et il répondit à quelqu’un qui le plaisantait :

— Elle ne tombera que lorsque j ’aurai achevé mon prochain roman.

— Et s’il y a plusieurs volumes ?

— Il y en aura quinze.

— Vous ne vous raserez donc que dans quinze ans ?

— Rassurez-vous, j’écris un demi-volume par jour.

Il arriva à Rétif d’écrire quatre-vingt-cinq volumes en six ans. Ses premiers ouvrages lui rapportèrent peu, et il fut victime des contrefacteurs.

Il avait vendu Lucile trois louis, et il disait de son libraire :

— Cet homme, suppôt de police, a fait fortune ; il est mort au moment d’en jouir.

Plus tard, il gagna assez d’argent avec le Paysan Perverti, notamment. Il aurait gagné davantage sans les contrefaçons. Cette peinture