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CHAPITRE IX


Rapport de Thérèse et ce qu’elle fit pour prouver qu’elle ne mentait pas.


La téméraire soubrette demeura beaucoup plus longtemps que je ne m’y attendais, et j’étais déjà fort inquiète de son retard, quand je l’entendis enfin rire dans le corridor et parler ; je crus qu’elle était avec quelqu’un : cependant elle rentra seule. Pressée de la plus vive curiosité, je lui fis cent questions. Mais, sans y répondre et riant par éclats, la folle ne cessait de répéter : Ah ! la plaisante aventure ! la bonne folie ! le drôle de corps ! Je perdais patience. À la fin pourtant, j’appris que ces ris immodérés étaient occasionnés par la plus singulière scène du monde, qui se passait à l’heure même dans la chambre d’Éléonore, et dont la porteuse de culotte venait d’entendre une partie. — « M. le chevalier, dit l’évaporée, s’interrompant à chaque mot pour éclater de rire, M. le chevalier est là-haut… chez la divine Éléonore, à qui il tient, je ne sais sous quel prétexte, les propos les plus originaux. Je défie l’homme le mieux ivre, le plus facétieux histrion, d’imaginer un amphigouri pareil à celui qu’il débite. Il a cependant passé la nuit avec la chère demoiselle, rien n’est plus évident… Tout ce qu’il dit y a rapport. Ils ont couché ensemble, mademoiselle ! Cela est clair. Comment trouvez-vous la chose ? Et qui diable ne rirait pas d’une découverte pareille ? » — Mais, interrompis-je, êtes-vous bien sûre, Thérèse… — Tout à fait sûre, mademoiselle. — Que ce soit le chevalier ? » — Ah ! c’est bien lui-même ; peut-on méconnaître son joli son de voix ? il traite Mlle  Éléonore d’épouse chérie, d’adorable déité. » — Vous extravaguez, ma mie Thérèse, dis-je un peu piquée, mais ne pouvant encore croire un conte qui, selon moi, n’avait pas la moindre vraisemblance. — Eh ! parbleu, mademoiselle, répliqua-t-elle en continuant ses ris, si vous