Page:Nerciat - Félicia.djvu/116

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doutez que ce que je dis soit vrai, donnez-vous la peine de vous lever et de me suivre, vous verrez… — Non, il y aurait un autre moyen…

Je n’eus pas le temps d’achever. Thérèse avait de l’esprit, elle devina ce que j’hésitais à lui proposer, partit et ne reparut plus ; ce fut le chevalier qui revint à sa place, riant aussi de tout son cœur.

Piquée contre le volage adorateur, déjà coupable de plusieurs infidélités, quoique nous ne vécussions ensemble qu’à peine depuis un mois, je le laissai chercher à tâtons mon lit, sans daigner le guider d’une seule parole. Mais il sut bien me trouver. Je perdis tout à coup la moitié de ma colère quand je sentis les belles mains de l’inconstant toucher mon sein et sa bouche angélique surprendre la mienne au moment où je délibérais si je voulais la détourner. J’eus cependant le courage de lui dire, avec une aigreur apparente, qu’il me laissât et retournât vers son épouse chérie, vers l’aimable déité. Ce reproche ne le fâcha point ; et sans perdre du temps à se justifier, il eut recours au remède infaillible… Je m’apaisai.

« Encore, mon cher amour » (soupirai-je, en ressuscitant pour la seconde fois),… mais je me repentis de cette prière indiscrète quand j’eus touché quelque chose qui se trouvait pour lors dans l’impossibilité de me complaire. — Hélas ! dit tristement le pauvre chevalier, voilà le vrai châtiment de mes sottises. Jamais coupable fut-il plus cruellement puni ! mais Vénus n’abandonne pas pour longtemps ses fidèles adorateurs. Avant que je n’aie fini de te raconter la rare aventure qui vient de m’arriver, je serai désenchanté ; et tu es trop généreuse pour me refuser ma revanche. » Un baiser de flamme fut le sûr garant de ma bonne volonté ; nous demeurâmes voluptueusement groupés ; et ce fut dans l’attitude la plus propre à opérer un prompt désenchantement que le chevalier se mit à me raconter ce qu’on va lire dans le chapitre suivant.