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il trouva le moment de donner à Sylvina, pour le jeune Monrose, vingt-cinq louis qu’elle ne put refuser, sir Sydney l’assurant qu’il tiendrait à honneur que ce brave enfant voulût bien agréer cette légère marque de son estime.




CHAPITRE VI


Où l’on ne verra rien d’étonnant.


Le reste du voyage fut très heureux. Mon cœur palpita lorsque nous approchâmes de la capitale ; mais ma joie n’avait rien de comparable à celle du beau Monrose. Il dévorait des yeux les moindres objets, non avec la stupide admiration des sots, mais avec ce désir vif, si naturel à un jeune homme plein de feu, qui sort pour la première fois d’une prison, où rien n’a jamais pu l’affecter agréablement. Nous arrivâmes enfin. Notre laquais, que nous avions fait partir pendant la nuit avec celui de sir Sydney, nous attendait ; les appartements étaient préparés ; on logea Monrose dans une pièce qui donnait d’un côté dans la chambre à coucher de Sylvina, et de l’autre sur un corridor, à côté de la mienne. Nous n’étions pas scrupuleuses ; au surplus nous n’avions personne qui pût trouver à redire à cet arrangement ; et je ne me suis jamais repentie qu’il ait eu lieu.

Le chevalier Sydney vint nous voir le lendemain, quoiqu’il eût appris de son laquais, instruit par le nôtre, que nous étions à peu près de ces femmes qu’on nomme du monde. Il n’en rabattit point avec nous, et nous eûmes tout lieu d’être contentes de sa politesse. Nous devions aller au spectacle, c’est un des premiers besoins des pauvres gens qui viennent de s’ennuyer en province. Le chevalier offrit de nous accompagner au Français, que nous avions pré-