Page:Nerciat - Félicia.djvu/240

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(Robert était le nom que j’avais pris pendant mes voyages), quoi ! tu ne répugnerais pas à porter la livrée de Kerlandec ? — Moi, mon cher ! ah ! plût à Dieu que je pusse me flatter d’un si grand bonheur !… — D’un si grand bonheur que celui de devenir laquais de cette belle dame ? Ah ! parbleu, si tu es homme à faire cette extravagance, je me fais fort de te placer dans sa maison. Quitte-moi vite cette épée, endosse-moi ton plus mauvais habit et te prépare à me suivre. Je me suis embarqué deux fois avec M. de Kerlandec, il me veut quelque bien ; je lui dirai que tu es un de mes parents, que tu te trouves sans ressource, forcé par des raisons d’intérêt à ne pas t’éloigner du pays ; je lui demanderai qu’il te reçoive au nombre de ses domestiques, en attendant la fin de tes affaires. En un mot, je me charge de tout. Que risqué-je ? Le mari part. J’en fais autant sous peu de jours. C’est à toi de t’arranger comme tu pourras avec la dame et à tirer parti de la différence qu’il y a de M. Robert à un laquais ordinaire.

« Je manquai d’étouffer dans mes bras l’officieux pilote. Il me semblait qu’un dieu venait de parler. Il fut exact. Le hasard nous servit au delà de nos espérances. On avait réformé le même jour un laquais mutin, dont M. de Kerlandec ne prévoyait pas que sa femme pût être bien servie pendant son absence. Je pris sa place. J’avais une physionomie douce, un maintien honnête ; M. de Kerlandec lui-même pressa sa femme de m’agréer. Le lendemain, il partit. »




CHAPITRE XXX


Continuation.


« C’était à Paris, chez son beau-père, que Mme  de Kerlandec devait attendre le retour éloigné de son époux. Nous