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aussi inutiles que le mien et qui, faute d’être aussi vrais, ne sont pas, à beaucoup près, aussi vraisemblables.




CHAPITRE II


Qui serait plus ennuyeux s’il était plus long.


Je me hâtai de faire part à milord Sydney des aventures du comte, qu’il avait tant d’impatience de savoir. J’avais prévu sa réponse, il était en effet ce rival heureux si constamment fatal à notre étranger. Il croyait l’avoir tué à Paris et, comme leur combat s’était passé de nuit, il ne l’avait point reconnu à Bordeaux ; il était charmé que le comte vécût encore : quant à M. de Kerlandec, il ne se faisait aucun reproche de lui avoir ôté la vie. Cet homme féroce l’avait bien mérité. Sydney me promettait de m’apprendre bientôt comment. — Mais, ajoutait-il, quelle est ma bizarrerie, chère Félicia ! définissez-la-moi, si vous le pouvez. Concevrez-vous qu’ayant conservé si longtemps pour Zéila une passion, aussi vive dans un autre genre que celle du comte lui-même, je puisse me trouver aujourd’hui presque indifférent pour cette femme ? J’entrevois cependant qu’il ne serait pas impossible de la retrouver. J’ai eu d’elle deux enfants, l’un avant que le cruel Kerlandec me l’eût ravie ; elle était grosse du second quand ce forcené de Robert me chercha querelle. Quelques mois plus tôt, je me serais cru bien heureux de la savoir libre !… Après avoir témoigné tant d’amour pour moi et tant de haine pour son mari, refuserait-elle de me pardonner d’avoir tué Kerlandec en brave, quand moi-même j’avais pardonné la faiblesse qu’elle avait eue d’épouser celui… qui…

Mais je ne veux pas anticiper. Qu’on sache seulement que