Page:Nerval - Aurélia, Lachenal & Ritter, 1985.djvu/82

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bordaient de hautes collines. La plus morne tristesse entra dans mon cœur. — J’allai coucher dans une auberge où j’étais connu. L’hôtelier me parla d’un de mes anciens amis, habitant de la ville, qui, à la suite de spéculations malheureuses, s’était tué d’un coup de pistolet… Le sommeil m’apporta des rêves terribles. Je n’en ai conservé qu’un souvenir confus. — Je me trouvais dans une salle inconnue et je causais avec quelqu’un du monde extérieur, — l’ami dont je viens de parler, peut-être. Une glace très haute se trouvait derrière nous. En y jetant par hasard un coup d’œil, il me sembla reconnaître Aurélia. Elle semblait triste et pensive, et tout à coup, soit qu’elle sortît de la glace, soit que, passant dans la salle, elle se fût reflétée un instant auparavant, cette figure douce et chérie se trouva près de moi. Elle me tendit la main, laissa tomber sur moi un regard douloureux et me dit : « — Nous nous reverrons plus tard… à la maison de ton ami. »

En un instant, je me représentai son mariage, la malédiction qui nous séparait… et je me dis : — Est-ce possible ? reviendrait-elle à moi ? « — M’avez-vous pardonné ? » demandai-je avec des larmes. Mais tout avait disparu. Je me trouvais dans un lieu désert, une âpre montée semée de roches, au milieu des forêts. Une maison, qu’il