Page:Nerval - Nos adieux à la Chambre des députés, 1831.djvu/7

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AU PEUPLE.


Le père Gérard, comme vous le savez, braves gens, fut un honnête patriote de 89, qui publia, non pas de gros livres, mais de petits écrits destinés à l’amusement et surtout à l’instruction du peuple. Il avait fait d’assez bonnes études ; il était malin, homme de sens, et ne se laissait pas séduire par de belles paroles ; de sorte que, lorsqu’il découvrait quelques manigances faites contre le peuple par les hommes qui sont payés pour le rendre heureux, il prenait aussitôt la plume pour expliquer clairement la chose ; il n’engageait pas les gens à s’attrouper, à crier dans les rues ; car ce sont des jeux d’enfans qui ne mènent à rien ; mais il leur disait : Faites vos plaintes comme des hommes doivent le faire : si mauvaises que soient les lois d’un pays, l’opprimé peut toujours se faire entendre ; celui qui ne réclame que ce qui est juste peut avoir la parole haute et le regard assuré, et si on ne l’écoute pas, il a le droit de chansonner les fonctionnaires sourds et mal avisés : les Richelieu, les Mazarin n’ont point échappé aux noëls dont on chantait les refrains sur la Place-Royale, et jusque sous les portes du Louvre.

Du temps de l’empire, le père Gérard a gardé le silence ; on parlait trop souvent de la gloire pour qu’il fût question de la liberté.

Pendant la restauration, on parlait trop