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PAR DELÀ LE BIEN ET LE MAL

anciennement, qui sont devenues prédominantes et, pendant un certain temps, ont été nommées « vérités » — valeurs dans le domaine logique, politique (moral) ou artistique. Il appartient à ces chercheurs de rendre visible, concevable, saisissable, maniable tout ce qui s’est passé et a été estimé jusqu’à présent, de raccourcir tout ce qui est long, le « temps » lui-même, et de subjuguer tout le passé : tâche prodigieuse et admirable au service de laquelle tout orgueil délicat, toute volonté tenace, peuvent trouver satisfaction. Mais les véritables philosophes ont pour mission de commander et d’imposer la loi. Ils disent : « Cela doit être ainsi ! » Ils déterminent d’abord la direction et le pourquoi de l’homme et disposent pour cela du travail préparatoire de tous les ouvriers philosophiques, de tous les assujettisseurs du passé, — ils saisissent l’avenir d’une main créatrice, et tout ce qui est et a été leur sert de moyen, d’instrument, de marteau. Leur « recherche de la connaissance » est création, leur création est législation, leur volonté de vérité est… volonté de puissance. — Existe-t-il aujourd’hui de pareils philosophes ? Y eut-il jamais de pareils philosophes ? Ne faut-il pas qu’il y ait de pareils philosophes ?…

212.

Il me parait de plus en plus certain que le philosophe, en sa qualité d’homme nécessaire de