Page:Palante - La Sensibilité individualiste, Alcan, 1909.djvu/80

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moralisme sont contradictoires entre elles. Car, si la morale est impuissante, indifférente et inoffensive, il est vain et ridicule de fulminer contre elle.

Nous allons essayer de caractériser ces deux types d’immoralisme ; de voir à quelle sorte de sensibilité et d’intellectualité ils correspondent et aussi quelle vérité relative ils peuvent contenir.

La définition que nous avons donnée de l’immoralisme du premier genre est une définition très générale et par suite un peu vague. Elle se précisera par l’exposé des conceptions particulières qui rentrent sous cette rubrique.

Le père de l’immoralisme entendu dans le premier sens est le philosophe français Bayle, qui, dès 1682, dans ses Pensées sur la Comète et dans la Critique générale de l’Histoire du Calvinisme du père Maimbourg, soutient cette thèse que la morale n’a qu’une influence insignifiante sur la conduite de l’individu ; que celui-ci fait toujours en fin de compte ce que son tempérament lui commande. On trouve à la table des matières des Pensées diverses sur la Comète des articles comme celui-ci : Il ne faut juger de la vie d’un homme ni par ce qu’il croit, ni par ce qu’il publie dans ses livres… L’homme ne vit point selon ses principes… ; ou encore celui-ci : Passions médiocres faciles à réprimer. — La morale ne fait rien quand elle n’a pas le tempérament pour complice. Elle triomphe quand elle recommande la chasteté à un tempérament froid.