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la guerre des boutons


– Dis rien, souffla Lebrac, j’ai une idée.

Et l’on entra.

Dès que Lebrac fut installé à sa place, ses cahiers et ses livres devant lui, il commença par arracher proprement une feuille double du milieu de son cahier de brouillons. Il la partagea ensuite, par pliages successifs, en trente-deux morceaux égaux sur lesquels il traça, il condensa cette capitale interrogation :

Hattu unçou ? (traduire : as-tu un sou ?)
puis il mit sur chacun desdits morceaux, dûment pliés, les noms de trente-deux de ses camarades et poussant d’un coup de coude brusque Tintin, il lui glissa, subrepticement et l’une après l’autre, les trente-deux missives en les accompagnant de la phrase sacramentelle : « Passe ça à ton voisin ! »

Ensuite, sur une grande feuille, il réinscrivit ses trente-deux noms et pendant que le maître interrogeait, lui aussi, du regard, demandait successivement à chacun de ses correspondants la réponse à sa question, pointant au fur et à mesure, d’une croix (+) ceux qui disaient oui, d’un trait horizontal (-) ceux qui disaient non. Puis il compta ses croix : il y en avait vingt-sept.

– Y a du bon ! pensa-t-il. Et il se plongea dans de profondes réflexions et de longs calculs pour