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la guerre des boutons


du thé, du café, des grogs et, toujours hoquetant, il se calma un peu et baissa les paupières.

Un quart d’heure après, un peu remis, il rouvrait les yeux et racontait à ses parents, ainsi qu’aux nombreuses femmes qui entouraient sa couche, tout ce qui venait de se passer à la cabane, en omettant toutefois soigneusement de spécifier les motifs qui lui avaient valu ce traitement barbare, c’est-à-dire sa trahison.

Il dit tout le reste : il vendit tous les secrets de l’armée de Longeverne, il narra les escapades à la Saute et les batailles, il confessa les boutons chipés et la contribution de guerre, il dévoila tous les trucs de Lebrac, dénonça tous ses conseils ; il chargea Camus autant qu’il put ; il dit les planches dérobées, les clous soustraits, les outils empruntés et la noce, la goutte, le vin, les pommes et le sucre volés, les chants obscènes, la dégueulade au retour, et les farces à Bédouin et le culottage de saint Joseph avec les dépouilles de l’Aztec des Gués, tout, tout, tout ; il se dégonfla, se vida, se vengea et s’endormit là-dessus avec la fièvre et le cauchemar.

Marchant sur la pointe des pieds, une à une ou par petits groupes, s’arrêtant de temps à autre pour jeter un coup d’œil sur l’intéressant malade, les visiteuses se retirèrent. Mais elles s’attendirent au seuil de la porte, et, toutes réunies, conférèrent, s’animèrent, s’excitèrent, se montèrent jusqu’à la