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la guerre des boutons


ment et il s’est tourné par hasard de son côté comme s’il le regardait, même que mon père se demandait s’il n’allait pas lui sauter dessus.

Mais pas du tout, le pépé[1] n’y songeait guère : il s’est déboutonné, puis il s’est mis à pisser tranquillement, et mon père disait qu’il en finissait pas de secouer son outil et qu’il trouvait le temps bougrement long parce que ça le piquait à la « gargotte »[2] et qu’il avait peur de tousser ; alors sitôt que le grand-papa a été parti, il a pu se redresser et reprendre son souffle, et un quart d’heure après il était « pieuté » avec ma mère, à la chambre haute.

Voilà ce qu’ils faisaient ! Est-ce qu’on a jamais fait des « trueries » comme ça, nous autres ? Hein, je vous le demande, c’est à peine si on embrasse de temps en temps nos bonn’amies quand on leur donne un pain d’épices ou une orange, et pour un sale traître et voleur qu’on fouaille un tout petit peu, ils font des chichis et des histoires comme si un bœuf était crevé.

— Mais c’est pas ça qui empêchera qu’on fasse son devoir.

— Tout de même, bon Dieu ! qu’il y a pitié aux enfants d’avoir des père et mère !

Un long silence suivit cette réflexion. Lebrac

  1. Grand-père.
  2. Gargotte, gorge.