Page:Poe - Derniers Contes.djvu/224

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mension. J’éprouvai une extrême difficulté à m’y faufiler. Cependant, je dormis profondément ; et l’ensemble de ma vision — car ce n’était ni un songe, ni un cauchemar — provint naturellement des circonstances de ma position — du train ordinaire de ma pensée, et de la difficulté, à laquelle j’ai fait allusion, de recueillir mes sens, et surtout de recouvrer ma mémoire longtemps après mon réveil. Les hommes qui m’avaient secoué étaient les gens de l’équipage du sloop, et quelques paysans engagés pour le décharger. L’odeur de terre m’était venue de la cargaison elle-même. Quant au bandage de mes mâchoires, c’était un foulard que je m’étais attaché autour de la tête à défaut de mon bonnet de nuit accoutumé.

Toutefois, il est indubitable que les tortures que j’avais endurées égalèrent tout à fait, sauf pour la durée, celles d’un homme réellement enterré vif. Elles avaient été épouvantables — hideuses au delà de toute conception. Mais le bien sortit du mal ; leur excès même produisit en moi une révulsion inévitable. Mon âme reprit du ton, de l’équilibre. Je voyageai à l’étran-