Page:Poe - Derniers Contes.djvu/332

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Baigne-t-y, bois de ses eaux,
Si tu l’oses !

Prenez-la tendrement ;
Soulevez-la avec soin ;
Son enveloppe est si frêle,
Elle est jeune et si belle !
Avant que ses membres glacés,
Ne soient trop rigidement raidis,
Décemment — tendrement
Aplanissez-les et arrangez-les ;
Et ses yeux, fermez-les ;
Ces yeux tout grands ouverts sans voir !

Épouvantablement ouverts et regardant
À travers l’impureté fangeuse,
Comme avec le dernier regard
Audacieux du désespoir
Fixe sur l’avenir.

Elle est morte sombrement,
Poussée par l’outrage,
La froide inhumanité,
La brûlante folie,
Dans son repos.
Croisez ses mains humblement,
Comme si elle priait en silence,
Sur sa poitrine !
Avouant sa faiblesse,
Sa coupable conduite,
Et abandonnant, avec douceur,
Ses péchés à son Sauveur !


Ce poème n’est pas moins remarquable par sa vigueur que par son pathétique. La versification, tout en poussant la fantaisie jusqu’au fantastique, n’en est pas moins