Page:Poincaré - La Science et l’Hypothèse.djvu/175

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principes généraux. Qui ne voit en effet qu’en séparant ces deux sciences je les mutile l’une et l’autre, et que ce qui restera de la mécanique conventionnelle quand elle sera isolée ne sera que bien peu de chose, et ne pourra nullement être comparé à ce superbe corps de doctrine que l’on appelle géométrie ?

On comprend maintenant pourquoi l’enseignement de la mécanique doit rester expérimental.

C’est ainsi seulement qu’il pourra nous faire comprendre la genèse de la science, et cela est indispensable pour l’intelligence complète de la science elle-même.

D’ailleurs, si on étudie la mécanique, c’est pour l’appliquer ; et on ne peut l’appliquer que si elle reste objective. Or, ainsi que nous l’avons vu, ce que les principes gagnent en généralité et en certitude, ils le perdent en objectivité. C’est donc surtout avec le côté objectif des principes qu’il convient de se familiariser de bonne heure, et on ne peut le faire qu’en allant du particulier au général, au lieu de suivre la marche inverse.

Les principes sont des conventions et des définitions déguisées. Ils sont cependant tirés de lois expérimentales, ces lois ont été pour ainsi dire érigées en principes auxquels notre esprit attribue une valeur absolue.

Quelques philosophes ont trop généralisé ; ils ont cru que les principes étaient toute la science et par conséquent que toute la science était conventionnelle.