Page:Poincaré - La Science et l’Hypothèse.djvu/221

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que nous croyions simples, subsistent encore entre ces mêmes objets quand nous connaissons leur complexité, et c’est cela seul qui importe. Nos équations deviennent de plus en plus compliquées, c’est vrai, afin de serrer de plus près la complication de la nature ; mais rien n’est changé aux relations qui permettent de déduire ces équations les unes des autres. En un mot, la forme de ces équations a résisté.

Prenons pour exemple les lois de la réflexion, Fresnel les avait établies par une théorie simple et séduisante que l’expérience semblait confirmer. Depuis, des recherches plus précises ont prouvé que cette vérification n’était qu’approximative ; elles ont montré partout des traces de polarisation elliptique. Mais, grâce à l’appui que nous prêtait la première approximation, on a trouvé tout de suite la cause de ces anomalies, qui est la présence d’une couche de passage ; et la théorie de Fresnel a subsisté dans ce qu’elle avait d’essentiel.

Seulement on ne peut s’empêcher de faire une réflexion : Tous ces rapports seraient demeurés inaperçus si l’on s’était douté d’abord de la complexité des objets qu’ils relient. Il y a longtemps qu’on l’a dit : Si Tycho avait eu des instruments dix fois plus précis, il n’y aurait jamais eu ni Képler, ni Newton, ni Astronomie. C’est un malheur pour une science de prendre naissance trop tard, quand les moyens d’observation sont devenus trop parfaits. C’est ce qui arrive aujourd’hui à la physico-chimie ; ses fondateurs sont gênés dans