Page:Poincaré - La Science et l’Hypothèse.djvu/269

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Notre choix ne peut donc être guidé que par des considérations où la part de l’appréciation personnelle est très grande ; il y a cependant des solutions que tout le monde rejettera à cause de leur bizarrerie et d’autres que tout le monde préférera à cause de leur simplicité.

En ce qui concerne l’électricité et le magnétisme, Maxwell s’abstient de faire aucun choix. Ce n’est pas qu’il dédaigne systématiquement tout ce que ne peuvent atteindre les méthodes positives ; le temps qu’il a consacré à la théorie cinétique des gaz en fait suffisamment foi. J’ajouterai que si, dans son grand ouvrage, il ne développe aucune explication complète, il avait antérieurement tenté d’en donner une dans un article du Philosophical Magazine. L’étrangeté et la complication des hypothèses qu’il avait été obligé de faire, l’avaient amené ensuite à y renoncer.

Le même esprit se retrouve dans tout l’ouvrage. Ce qu’il y a d’essentiel, c’est-à-dire ce qui doit rester commun à toutes les théories, est mis en lumière ; tout ce qui ne conviendrait qu’à une théorie particulière est presque toujours passé sous silence. Le lecteur se trouve ainsi en présence d’une forme presque vide de matière qu’il est d’abord tenté de prendre pour une ombre fugitive et insaisissable. Mais les efforts auxquels il est ainsi condamné le forcent à penser et il finit par comprendre ce qu’il y avait souvent d’un peu artificiel dans les ensembles théoriques qu’il admirait autrefois.