Page:Poincaré - La Science et l’Hypothèse.djvu/50

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toujours quand nous voudrons imaginer nos bandes de plus en plus minces, de sorte que nous admettrons comme une vérité intuitive que si une droite est partagée en deux demi-droites, la frontière commune de ces deux droites est un point ; nous reconnaissons là la conception de Kronecker, où un nombre incommensurable était regardé comme la frontière commune de deux classes de nombres rationnels.

Telle est l’origine du continu du deuxième ordre, qui est le continu mathématique proprement dit.


Résumé. — En résumé, l’esprit a la faculté de créer des symboles, et c’est ainsi qu’il a construit le continu mathématique, qui n’est qu’un système particulier de symboles. Sa puissance n’est limitée que par la nécessité d’éviter toute contradiction ; mais l’esprit n’en use que si l’expérience lui en fournit une raison.

Dans le cas qui nous occupe, cette raison était la notion du continu physique, tirée des données brutes des sens. Mais cette notion conduit à une série de contradictions dont il faut s’affranchir successivement. C’est ainsi que nous sommes contraints à imaginer un système de symboles de plus en plus compliqué. Celui auquel nous nous arrêterons est non seulement exempt de contradiction interne, il en était déjà ainsi à toutes les étapes que nous avons franchies, mais il n’est pas non plus en contradiction avec diverses proposi-