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La beauté du cheval pour les connaisseurs, qui, il est vrai, sont encore peu nombreux, n’est pas celle qui flatte seulement la vue, mais bien celle qui implique la force, la vigueur, la souplesse. Pour eux, enfin, le mot beauté, appliqué au cheval, a la même signification que bonté, c’est du reste le sens qu’on doit lui accorder. Un bon cheval n’est-il pas, en effet, celui qui remplit aussi bien que possible le service qu’on exige de lui ? En France, on est resté longtemps sans attribuer à la beauté son véritable sens, aussi les races chevalines ont-elles souffert dans leur amélioration ; tandis qu’en Angleterre, où la belle conformation fut considérée sous un meilleur point de vue, l’hippologie fit des progrès plus rapides, et pourtant ce pays se prête moins que le nôtre à l’élevage du cheval, à cause de la rigueur de son climat. Mais nos voisins d’Outre-Manche, assez bien pénétrés de la valeur de la beauté zootechnique (ζώον, animal ; τέχνη, art), ont su tirer parti de leurs connaissances ; d’ailleurs, d’un naturel persévérant, ils n’ont rien négligé pour arriver au but qu’ils s’étaient proposé. Ils savaient parfaitement diriger leurs moyens d’amélioration, de telle sorte que le résultat auquel ils visaient fût assez vite atteint. De nos jours encore ils sont généralement plus connaisseurs que nous et ne se laissent pas aller aux vaines apparences, ils savent apprécier les formes comme elles doivent l’être, en les rapportant à telle ou telle aptitude spéciale. Tout cela vient, il n’y a pas à en douter, du point de départ, car ils ont pris pour types des animaux d’une parfaite conformation, Éclipse en est un exemple. Longtemps avant les Anglais, les Arabes et les Berbères étaient pénétrés de la science hippique, témoins les beaux chevaux Numides dont parlent une foule d’auteurs recommandables, et entre autres Salluste, qui en fait mention à propos de Jugurtha, roi de Numidie (115 ans avant J.-C.). Et il fallait bien que ces animaux eussent une valeur réelle, une beauté bien comprise,