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DU MANGEUR D’OPIUM

habitants, la race du monde la plus portée à l’équitation, un réseau général de chemins pour les chevaux montés. Aujourd’hui même, il est douteux qu’un homme puisse, en tenant compte de tous les obstacles, et sans disposer à l’avance des relais, dépasser l’exploit de Cary (plus tard Lord Monmouth) fils cadet du premier Lord Hunsden, cousin d’Elisabeth. Ce cavalier avait, d’une manière assez méprisable, étant donnée sa parenté avec la reine, et en vrai courtisan qu’il était, promis de porter au roi d’Écosse un certain message de son avénement au trône d’Angleterre, et comme il excellait en équitation, il avait formé, à part lui, le dessein d’être le premier à annoncer la grande nouvelle, si sa situation ne faisait pas de lui le messager officiel. La reine mourut le dernier jour (selon le calcul du temps) de 1602, c’est-à-dire le 24 mars 1603. Cary, quoique sous le coup de l’embargo et de l’interdiction du Conseil privé, trouva le moyen de se glisser hors de la place, grâce à son frère, grand officier de la maison de la Reine. Le premier jour de 1603, c’est-à-dire le jour que nous appellerions celui de l’Annonciation, ou le 25 mars 1603, il monta à cheval à Londres, et, le lendemain, en dépit de tous les délais, en dépit du retard que lui avaient imposé les formalités de la frontière où il exerçait un grand commandement, et d’une violente chute de cheval, il réussit à atteindre la capitale d’Écosse à l’heure où le roi allait se coucher. En résumé, il ne mit pas plus de 33 ou de 35 heures à parcourir un trajet qui ne pouvait être inférieur à 450 milles. Nous trouvons ce récit dans les Mémoires mêmes de Lord Monmouth. Néanmoins nous ne devons pas oublier que la route dont il s’agit dans cet exploit était la